Beaucoup de pèlerins se demandent quel est le meilleur chemin pour aller à Compostelle : le Camino Francés qui passe par l’intérieur des terres ou le Camino del Norte longeant la côte.

Le sujet est délicat et déchaîne les passions : chacun en effet, selon son expérience, va défendre « son » camino. Mon avis est tout aussi personnel, mais je vais essayer de l’argumenter du mieux que je peux, afin que vous puissiez faire votre choix en fonction de vos propres aspirations.

Carte du Camino Frances et du Camino del Norte

Le Camino Francés (en jaune) et le Camino del Norte (en noir le long de la côte)

Mon avis en bref

Le Camino Francés attire la foule et est très commercial. Mais il comporte une « magie » unique et incomparable, que vous ne retrouverez sur aucun autre chemin. Il traverse des lieux imprégnés par l’Histoire du pèlerinage et son sol a été foulé par des millions de pèlerins avant vous. Pour moi, c’est LE chemin, unique, initiatique et magique.

Le Camino del Norte longue la côte. Si vous êtes un amoureux de l’océan, et que c’est en regardant vers le large que votre âme s’envole, ce chemin est fait pour vous. Mais si vous aspirez à trouver le calme, loin des constructions, des routes et de la foule des touristes balnéaires (surtout en été), passez votre chemin.

Mon expérience de ces deux chemins

Mon expérience des deux chemins ne se compare pas vraiment : j’ai passé deux étés sur le Camino Francés (un pour l’aller, l’autre pour le retour) et seulement 10 jours sur le Camino del Norte, entre Santander et Oviedo, ce qui ne m’a pas empêché de « mener mon enquête » auprès des pèlerins que j’y ai croisés.

La longueur

  • Camino del Norte : 836,5 km d’Irun à Santiago (possibilité de raccourcir en passant par le Camino Primitivo)
  • Camino Francés : 800 km de Saint Jean Pied-de-Port à Santiago

Le départ

Si vous arrivez à pied de France (par Le Puy, Vézelay ou Paris), votre chemin vous mène tout droit à Saint Jean Pied-de-Port, point de départ du Camino Francés.

Pour rejoindre Irun, départ du Camino del Norte, il vous faudra emprunter un chemin vers l’ouest à travers les Pyrénées (GR10) ou au pied de celles-ci. Il existe un chemin balisé vers Irun mais il est très peu fréquenté (compter 3 à 4 jours de plus).

Vous pouvez évidemment prendre des transports en commun ou faire du stop pour gagner Irun, mais avouez que c’est dommage de « couper » son chemin si on est parti de loin…

La difficulté physique

Aucun des deux chemins n’est vraiment difficile au niveau relief. Le passage des Pyrénées puis de la Cruz de Hierro sur le Camino Francés ne présente pas de difficulté si on sait doser ses efforts et marcher à son rythme. Il y a des hébergements tous les 10-15 km sur le Camino Francés, ce qui permet de s’arrêter dès que l’on ressent la fatigue.

La partie la plus difficile du Camino del Norte est le Pays Basque, avec ses pentes très escarpées qui compensent largement le dénivelé du passage par Roncevaux sur le Camino Francés ! Une deuxième difficulté pourrait être la longueur des étapes, car il y a moins d’hébergements que sur le Camino Francés. Toutefois, l’offre de logement s’adapte à la demande et il y a de plus en plus d’hébergements sur le Camino del Norte.

Le goudron, le bruit, le béton

Si on prend toutes les variantes du Camino Francés (c’est-à-dire si on évite les raccourcis le long des nationales), on ne marche presque pas sur le goudron, sur 800 km, des Pyrénées à Santiago. Les portions du chemin près d’une route ou d’une autoroute existent (j’ai de mauvais souvenirs des environs de Fromista) mais ils sont vite compensés par un retour au calme et à la Nature.

Sur le Camino del Norte, j’ai marché 3 journées complètes sur le goudron après Santander ! La côte basque et cantabrique est très urbanisée. Par conséquent, les chemins y sont plus rares que dans l’arrière-pays. Mais ce qui m’a le plus dérangée sur le Camino del Norte, c’est la proximité de l’autoroute, que le chemin longe plus ou moins près, en particulier entre Santander et Villaviciosa. Je déteste les autoroutes, le bruit, le béton.

Les villes traversées

Sur le Camino Francés, les grosses villes à traverser sont Pampelune, Burgos et Léon. Sur le Camino del Norte, vous traverserez Bilbao, Santander et Gijon. Ces trois villes sont assez industrielles et les banlieues sont longues et tristounettes.

Mais l’entrée dans Pampelune et les banlieues de Burgos et Léon sont pénibles, elles aussi. Seul réconfort : la beauté des cathédrales de Burgos et Léon sur le Camino Francés et des centres historiques très agréables, tant à Pampelune qu’à Burgos et à Léon.

Les paysages

Le Camino Francés traverse une Espagne profonde, des petits villages hors du temps, qui seraient probablement dépeuplés si il n’y avait pas les pèlerins. Les paysages sont très variés, entre le Pays Basque vallonné, la Rioja sauvage, la Meseta désertique, le Bierzo fertile, la Galice toute verte,…

Le camino Francés, magique

Une vue du Camino Francés

Le camino del Norte longe l’océan. Vous l’apercevrez chaque jour et vous pourrez souvent l’approcher, au-dessus de belles falaises ou dans de petites criques ou même de belles plages. Le paysage en bord de mer change peu, avec une succession de villes, plages, villages, falaises,…

Une vue du Camino del Norte

Une vue du Camino del Norte

L’Histoire et la spiritualité

En raison de la conquête de l’Espagne par les Maures, il y a d’abord eu du passage sur le Camino Primitivo et le long de la côte. Mais très vite, les pèlerins ont emprunté le chemin dit « des Français », le Camino Francés. On y trouve de multiples traces du pèlerinage : ponts, hospices, chapelles, calvaires, cathédrales,… et tous ces vestiges sont en lien avec Saint Jacques ou ses pèlerins. Sur le Camino Francés, vous avez réellement la sensation de « marcher dans les pas dès pèlerins avant vous ».

Sur le Camino del Norte, les surfeurs et les amateurs de plage ont remplacé les pèlerins, et les vestiges historiques liés à Saint Jacques sont beaucoup plus rares, de même que les églises et chapelles, presque toujours fermées quand on en trouve.

Au-delà de cette dimension historique et religieuse, il y a quelque chose de plus sous vos pieds sur le Camino Francés : une vraie énergie se dégage des failles telluriques et ce n’est pas un hasard si le chemin jusqu’au Finisterre a été parcouru depuis des millénaires comme chemin initiatique. On y retrouve encore des pierres magiques, des fontaines aux vertus miraculeuses, des lieux aux énergies très particulières. C’est ce que j’appelle la « magie du Chemin », que je n’ai pas retrouvée sur le béton du Camino del Norte.

La foule

En 2016, sur les 278 000 pèlerins enregistrés à St Jacques, la proportion était de 10 à 1 entre les arrivées par le Camino Francés (176 118) et les arrivées par le Camino Del Norte (17 294), auxquelles il convient de rajouter celles du Camino Primitivo (12 090) qui peut être une variante du Camino del Norte.

Même si ces chiffres ne tiennent compte que des 100 derniers kilomètres parcourus, il est exact que le Camino Francés est beaucoup plus fréquenté que le Camino del Norte. Sur le Camino Francés, vous verrez presque toujours un pèlerin devant vous, et un autre derrière vous (sauf durant l’après-midi où vous marcherez seul sur le chemin). Sur le Camino del Norte, vous pouvez marcher plusieurs heures sans voir personne, en particulier si vous ne suivez pas les étapes du guide.

La course aux gîtes

Sur le Camino Francés, la course aux gîtes existe mais elle n’est absolument pas fondée, car l’offre de logement dépasse de loin la demande. Cette course est surtout palpable au début et à la fin du chemin. Si vous vous détachez de cette mini-frénésie, et marchez à votre rythme, en multipliant les pauses, vous aurez la joie d’avoir le chemin pour vous seul durant l’après-midi, tandis que les pèlerins pressés s’entassent dans les gîtes.

En été, le Camino del Norte est très fréquenté par des pèlerins, mais aussi par des amoureux de la plage, qui voient dans ce parcours une manière de faire du tourisme balnéaire à petit prix. Ce sont les mêmes parfois qui n’hésitent pas à resquiller et à faire un morceau de chemin en train ou en bus… Résultat, c’est une course aux gîtes encore plus féroce que sur le Camino Francès, car les hébergements sont moins nombreux et plus espacés.

Quoi qu’il en soit, sur les deux chemins, il y a beaucoup de possibilités de bivouaquer. Voici mes bonnes adresses sur le Camino Francés et sur le Camino del Norte. Ce n’est donc vraiment pas la peine de se battre pour une place minuscule dans un dortoir étouffant et bruyant.

Votre avis m’intéresse !

Mon avis est évidemment subjectif. Vous êtes d’accord, pas d’accord ? Votre avis est le bienvenu !

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